DEUX MILLE DIX SEPT
créé en 2017 / Centre Culturel André Malraux, Scène nationale - Vandoeuvre-lès-Nancy
conception et chorégraphie Maguy Marin
musique live Charlie Aubry
en étroite collaboration et avec Ulises Alvarez, Charlie Aubry, Laura Frigato, Françoise Leick, Louise Mariotte, Mayalen Otondo, Cathy Polo, Ennio Sammarco, Marcelo Sepulveda, Adolfo Vargas
lumières Alexandre Béneteaud son Antoine Garry et Loïc Goubet
régie plateau et scénographie Albin Chavignon
réalisation des costumes Nelly Geyres assistée de Raphaël Lo Bello
conception d'éléments costumes Montserrat Casanova
éléments d’accessoires Paul Pédebidau
merci à Marie-Lise Naud pour son regard extérieur et Louise Gros pour son aide
En 1928, Edward Bernays, le neveu américain de Sigmund Freud, a écrit un livre intitulé Propaganda, véritable petit guide pratique, qui expose cyniquement et sans détour les grands principes de manipulation mentale de masse, ce qu’il appelait "la fabrique du consentement".
Fervent partisan d’une «gouvernance de l’ombre», sa vie fut consacrée à l’une des tâches majeures du siècle dernier : celle qui consista à pervertir les démocraties pour faire plier les volontés des masses aux desseins des élites, en toute non-violence. Comprendre le mécanisme et les ressorts de la mentalité collective qui guident l’action humaine, en connaître les mobiles, équivaudrait à en assurer un contrôle invisible.
Pour "faire du monde une démocratie", il mobilise un grand nombre d’intellectuels, de journalistes, de penseurs pour la propagation d’idées qui puissent faire basculer rapidement l’opinion publique en faveur d’objectifs économiques et politiques précis. Il donne ainsi naissance à une nouvelle propagande : l’industrie des relations publiques.
En créant l’adhésion des masses par la distribution massive de communiqués, les nombreux appels à l’émotion dans des campagnes de publicité, le recrutement de leaders d’opinion locaux ou la mise sur pied de groupes de citoyens, il produira des événements dans l’espace public capables d’influencer et de former des citoyens inconsciemment soumis aux stratégies de domination et d’asservissement des peuples.
En 2017, l’obsolescence des hommes et des femmes qui ne s’adaptent pas aux cases de la concurrence et de la rentabilité est programmée d’avance. Comme pour les produits de consommation, ils sont déclarés jetables et périmés après leur courte utilisation, subissant toutes sortes d’humiliation en interne, dès l’instant qu’ils sont jugés inaptes selon les lois du marché à l’enrichissement illimité des chefs de l’entreprise qui les a employés. Le monde ancien qui avait la croyance en un progrès social qui libèrerait l’homme de son exploitation par d’autres hommes est mort pour laisser place à un monde régi par les rythmes des flux financiers avec lesquels le politique s’est associé pour le transformer au profit de quelques-uns par l’assujettissement de tous.
Au prétexte d’une crise appelée économique mais qui est principalement une crise de la répartition des richesses, nos vies sont soumises par des planifications politiques et économiques, difficiles à déchiffrer, à entrer dans la "danse" en jouissant d’un présent sans passé comme point d’appui pour conduire nos actions, sans futur à faire advenir. Entre amnésie et déni, nous fabriquons une fiction à laquelle nous voulons croire parce qu’elle nous arrange. En témoigne l’esprit fêtard qui de "happy hours" en Paris Plages, de la Nuit Blanche à la Fête de la Musique est partout. Elle est le visage grimaçant d’un monde “dynamique”, “sympa”, “jeune”, “citoyen”, “ouvert”. Mais cette fête pue la mort. Elle est peur de vieillir, angoisse refoulée, vide existentiel.
« Que cela suive son cours, voilà la catastrophe »
Pour Walter Benjamin, la catastrophe résulte hélas de ce à quoi tout le monde participe, ne fût-ce que silencieusement ou tacitement. Elle n’arrive pas par surprise, mais survient plutôt dans l’ordinaire des arrangements et des accoutumances. Mais si la catastrophe est bien désastre, elle contient pourtant en elle une dimension qui pourrait bien conduire au sauvetage, à condition de bouleverser le cours ordinaire des choses.
Dans ce contexte de tensions inouïes, nous ne savons plus comment conduire notre pensée et nos actes, nous nous "débrouillons" tant bien que mal pour permettre à nos désirs de se réaliser.
Mettre en chantier les sensations confuses qui nous laissent hébétés devant ce monde qui a insidieusement changé, voilà ce à quoi nous tenterons de donner forme. Nous tenterons de débusquer joyeusement ces "passions" qui nous meuvent et qui, de criminel en bon samaritain, nous révèleront un peu de ce que nous sommes capables pour assurer "la persistance de notre être" de la façon la moins barbare possible…
Maguy Marin
coproductions Centre Culturel André Malraux à Vandoeuvre-lès-Nancy
Théâtre de la Ville – Paris / Festival d’Automne à Paris / Maison des Arts de Créteil,
l’Opéra de Lille,
MC2 de Grenoble,
manège, scène nationale, Reims,
la Maison de la Danse de Lyon,
le CCN de Grenoble,
le CCN de Nancy,
le théâtre Garonne, scène européenne - Toulouse,
Compagnie Maguy Marin
l’ADAMI - L’Adami gère et fait progresser les droits des artistes-interprètes en France et dans le monde. Elle les soutient également financièrement pour leurs projets de création et de diffusion.
Avec le soutien du Théâtre, Scène nationale de Mâcon